La direction de l’Afpa annonce de « mauvais résultats en 2023 »

Le déficit de l’Afpa doit atteindre cette année 96M€. La direction estime que les causes de ce dérapage sont conjoncturelles, mais la CFE-CGC, inquiète, sollicite une mission parlementaire pour ouvrir le débat sur le rôle de l’EPIC (établissement public industriel et commercial).

Les 5500 salariés de l’Afpa ont reçu le 26 septembre dernier un message vidéo de la direction générale leur annonçant « de mauvais résultats en 2023 ». De quoi alerter les syndicats. Qu’en est-il exactement de la situation financière de l’EPIC ? Selon les chiffres communiqués au CA le 28 septembre, le déficit d’exploitation atteindra 96 M€ sur 2023. Ce déficit était précédemment de 60M€ en 2019, et de 80M€ en 2020, et de 21M€ en 2021. « Nous perdons plus d’argent cette année pour des raisons conjoncturelles, mais nous gardons la confiance de nos financeurs et pour l’instant il n’est pas question de supprimer des emplois, il faut rassurer les salariés sur ce point », insiste Guillaume Rauffet, directeur général délégué de l’Afpa.

Baisse de 27% des formations de demandeurs d’emploi

Comment expliquer cette aggravation du déficit ? D’une part les dépenses d’énergie ont « triplé par rapport à 2020 » explique la direction, à fortiori dans un patrimoine de bâtiments assez anciens, et d’autre part le nombre d’entrées en formation de demandeurs d’emploi « a baissé de 27% en deux ans » du fait de la baisse du chômage. « Or ces formations représentent la moitié de notre chiffre d’affaires », souligne Guillaume Rauffet. Et en dépit du nombre de stagiaires, l’Afpa met aussi en cause « le tarif insuffisant des formations » qu’elle souhaite renégocier avec les Régions, ainsi que le mode d’achat « à l’heure de formation réalisée par stagiaire » qui créé un manque à gagner en cas d’absence ou d’abandon de stagiaire.

Même situation qu’en 2017 (CFE-CGC)

Pour la CFE-CGC, premier syndicat de l’Afpa, les causes de ce déficit record ne sont pas que conjoncturelles. « Depuis la transformation en EPIC, l’endettement de l’Afpa est resté le même, soutient André Thomas, secrétaire général. Depuis 2017, pour combler ses déficits récurrents, l’Afpa a reçu chaque année une subvention exceptionnelle de l’Etat, dont le montant total s’élève à 943M€ en sept ans. On se retrouve dans la même situation qu’en 2017 », s’inquiète-t-il. La CFE-CGC a sollicité une mission parlementaire pour faire le point sur les missions de l’Afpa. « Soit l’Etat s’intéresse à l’Afpa, soit il continuera à perdre un milliard d’€ tous les cinq ans. Il faut un débat et une doctrine nationale, sinon on va dans le mur ».

Situations pas comparables (direction)

La direction générale conteste cette vision : « la situation n’est pas comparable à celle de 2017, estime Guillaume Rauffet, à cette époque l’Afpa perdait des marchés, l’Etat, les Régions, pôle emploi ne nous achetaient plus de formations. Aujourd’hui c’est différent, notre carnet de commandes est rempli. On forme 100 000 personnes par an dans tous les métiers en tension. Les entreprises nous sollicitent. On a des incubateurs de compétences dans des filières d’avenir, on travaille avec le secrétariat général à la planification écologique, on accompagne des entreprises qui relocalisent des emplois industriels. On a prouvé que l’Afpa est utile. Donc attention de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain ».

Tour de table avec les financeurs

Si du point de vue de la direction cette mission parlementaire demandée par la CFE-CGC n’est pas forcément le bon canal à mobiliser, elle aura au moins le mérite de faire parler de l’Afpa. « Nous avons besoin d’un tour de table avec nos financeurs pour reposer ces sujets. Il faut avoir cette réflexion sur les orientations stratégiques, d’autant que notre contrat d’objectif et de performance arrive à son terme. Aujourd’hui on a un dialogue un peu fermé avec nos deux tutelles – économie et travail -, on voudrait un dialogue interministériel, avec l’industrie, le tourisme, pour faire reconnaître l’Afpa de façon plus large », explique Guillaume Rauffet.

Source : Centre Inffo - 16 10 2023