Territoires zéro chômeur de longue durée: l’expérimentation se déploie dans toute la France
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- 19 avr. 2023
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Recyclerie, entretien d’espaces verts, maraîchage, ateliers de réparation de vélos et services de mobilité, travail du bois, conciergerie, visites touristiques guidées… les entreprises à but d'emploi des Territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD) ont ouvert leurs portes, début avril, à l’occasion du "Laboratoire des travaux utiles" 2023. L’occasion de mesurer le chemin parcouru pour cette expérimentation nationale qui grandit, avec désormais 53 territoires concernés, dont 43 habilités depuis le lancement de la deuxième étape à l'été 2021 (voir notre article du 14 juin 2021).
Officialisée dans dix premiers territoires par une loi votée en février 2016 puis élargie à "au moins 50 nouveaux territoires" par une deuxième loi en décembre 2020, la démarche consiste à créer une entreprise à but d'emploi (EBE) pour employer en CDI à temps choisi des "personnes privées durablement d'emploi" et développer avec ces dernières des activités utiles au territoire. Soutenue par une coalition de partenaires (élus, services de l'emploi, associations, entreprises…) réunie dans un comité local pour l'emploi (CLE), cette entreprise hors du commun est financée par "l'activation de la dépense passive" – financements de l'État au titre de la dépense globale de compensation du chômage de longue durée, du département au titre du revenu de solidarité active (RSA) et éventuellement d'autres partenaires – et par le chiffre d'affaires généré par les activités.
53 territoires expérimentateurs, dans un tiers des départements
Le financement obligatoire du département est une nouveauté de la deuxième loi. "Il y a parfois des réticences, certains départements considérant qu'ils n'ont pas à payer pour l'ensemble des bénéficiaires, qui ne sont pas uniquement des personnes au RSA. Or celles qui ne sont pas au RSA sont dans le non-recours, les personnes embauchées étant au chômage depuis quatre ans et demi en moyenne", relève Laurent Grandguillaume, président de l'association Territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD), interrogé par Localtis. "Ces réserves sont très minoritaires, ajoute-t-il, puisque les 53 territoires sont présents dans un tiers des départements français, dont la Martinique et La Réunion en outre-mer." Et, avec les quelque 100 autres territoires qui se préparent à déposer leur dossier de candidature, l'expérimentation serait présente dans tous les départements français.
"La mayonnaise prend partout, quelle que soit la configuration du territoire", assure l'ancien député de Côte-d'Or qui a porté la première loi d'expérimentation. "La seule difficulté qui peut exister, c’est celle de la volonté politique car le projet repose sur le consensus local", poursuit-il, rappelant que le comité local est présidé par le maire et parfois coprésidé par le président du département.
L'objectif ultime du projet, celui de l'"exhaustivité" ou encore de l'"éradication du chômage de longue durée", est en revanche plus difficile à atteindre dans les territoires urbains les plus denses, où plusieurs centaines de personnes sont durablement privées d'emploi. Parmi les dix premiers territoires d'expérimentation, trois territoires plutôt ruraux – Jouques, Pipriac Saint-Ganton et Mauléon – auraient atteint cette fameuse exhaustivité.
"Une stratégie de passage à l’échelle qui porte ses fruits"
"On a démontré que personne n’est inemployable et que, si l’on adapte l’emploi aux personnes, on peut vraiment faire en sorte que chacun trouve sa place dans un collectif de travail", se réjouit Laurent Grandguillaume. Environ 2.000 personnes ont été embauchées dans les EBE depuis le début de l'expérimentation, auxquelles s'ajoutent 800 personnes recrutées par d'autres employeurs locaux grâce aux dynamiques territoriales mises en place (c’est le cas à Castillon-la-Bataille, voir notre encadré ci-dessous).
Parmi les salariés des EBE, on compte beaucoup de seniors – la moyenne d'âge est de 45 ans – et de personnes en situation de handicap ; des personnes dont l'employabilité dans une entreprise classique ne va pas de soi. "À cela s’ajoute les difficultés de certains territoires, dont certains ont été frappés par la désindustrialisation", mentionne le président de TZCLD. Ces raisons expliquent pourquoi les personnes recrutées en EBE, selon le temps de travail qui leur convient, y restent majoritairement (10% de départs depuis le démarrage). "75% des hommes choisissent un temps plein et 75% des femmes un temps partiel, il y a beaucoup de familles monoparentales", précise Laurent Grandguillaume.
Avec une moyenne de 6.000 euros de chiffre d'affaires généré par équivalent temps plein (ETP) autour d'activités très variées, "l’équilibre financier vit", soutient-il. Autre motif de satisfaction pour l’association qui apporte son soutien aux expérimentations : des progrès en termes de management, de formation des salariés ou encore de relations avec les acteurs de l’insertion. L'association a structuré des dispositifs de transfert de savoir-faire entre les "anciens" territoires et les nouveaux, ce qui permet désormais d'"aller très vite dans l'amorçage". "On a construit toute une stratégie de passage à l’échelle qui porte ses fruits", se félicite le responsable associatif.
Vers une troisième loi en 2025 ?
À tel point que la communauté TZCLD pense déjà à la troisième étape de l'expérimentation, et même à une troisième loi que le président de la République se serait engagé à soutenir. L’association TZCLD va prochainement ouvrir une concertation avec l’ensemble des acteurs du projet pour esquisser les contours de cette troisième étape et adresser d’ici deux ans une proposition au gouvernement.
D’ici là, le déploiement prévu dans le cadre de la deuxième étape se poursuit et les territoires candidats à l'expérimentation ont jusqu’à juin 2024 pour déposer leur dossier. "Est-ce qu’il y aura suffisamment de territoires habilités ?", s'interroge Laurent Grandguillaume, qui rappelle que la loi prévoit un nombre plancher – 50 territoires – mais pas de plafond. En termes de crédits, "il n’y aura pas de difficulté en 2023, même si les territoires sont 70 ou 80, estime-t-il, la question va plutôt se poser en 2024", quand les EBE récemment créées auront davantage recruté.
Source : Banque des territoires - 19 04 2023







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