GLS : Dans le Grand Est, le thermalisme veut changer d'ère
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- 1 déc. 2022
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Près de 100 millions d’euros investis à Nancy, plus de 60 millions d’euros dans les Vosges et bientôt 24 millions d’euros dans le Bas-Rhin. Les groupes de thermalisme ne semblent pas avoir de peine à convaincre les investisseurs, malgré la forte baisse de fréquentation lors de la crise du Covid. Entre bien-être, tourisme et aménagement du territoire, le thermalisme peut-il trouver une nouvelle voie dans le Grand Est ?
Lors de la dernière belle année du thermalisme, en 2019, avant la crise sanitaire, les huit stations thermales du Grand Est (Morsbronn-les-Bains, Niederbronn-les-Bains, Contrexéville, Vittel, Bourbonne-les-Bains, Amnéville-les-Thermes, Plombières-les-Bains, Bains-les-Bains) ont accueilli près de 46 000 curistes et 640 000 clients "bien-être", venus pour profiter des bienfaits de l’eau et des installations. Selon les dernières enquêtes menées dans la région, le thermalisme emploie 1 244 personnes dans le Grand Est, pour un chiffre d’affaires total de 41,5 millions d’euros. En termes de retombées, les données collectées montrent que l’ensemble des personnes fréquentant les établissements thermaux consomme 34 millions d’euros dans l’économie locale et l’exploitation des stations débouche sur 18 millions d’euros d’achats auprès des fournisseurs locaux, pour un total de 24 millions d’euros de valeur ajoutée injectée dans l’économie. Un élan brisé par la crise du Covid et les fermetures administratives imposées aux établissements. Alors, demain, le secteur pourra-t-il retrouver le niveau d'activité de 2019 ?
Enclencher une nouvelle dynamique de marché
Catherine Gouttefarde, directrice générale de l’Agence régionale du tourisme (ART) Grand Est, décrit "un écosystème en profonde évolution et, même, en révolution !". Prudente, elle prévient : "Avant de promouvoir les offres, il faudra attendre une stabilisation du marché." Pour Bernard Riac, la cause est entendue : "Nos clients vont retrouver le chemin des établissements". Son groupe, Valvital, a pourtant perdu en 2020 65 % de son chiffre d’affaires, qui avait atteint 40 millions d’euros en 2019, "après dix années de croissance", souligne le PDG.
Exploitant quatre stations thermales sur les neuf à venir dans le Grand Est, Bernard Riac n’anticipe pas un retour à la normale avant l’exercice 2024, mais a programmé un investissement de 24 millions d’euros à Morsbronn-les-Bains, dans le Bas-Rhin, pour doubler la capacité d’accueil de la station. "Pour 2022, Valvital terminera l’année sur un recul de l’activité de l’ordre de 25 % par rapport à 2019, mais dès 2023, nous atteindrons les 50 millions d’euros de chiffre d’affaires, du fait notamment de l’ouverture de Nancy Thermal, qui devra rapidement peser entre 6 et 7 millions d’euros d’activité." Bernard Riac table sur 3 200 curistes la première année d’ouverture du complexe nancéien, avant que la fréquentation atteigne les 15 500 curistes par an en quatre à cinq ans.
La force du soutien public
L'ensemble de la station de Vittel va bénéficier d'un investissement global de plus de 60 millions d'euros.
Une confiance dans la capacité de rebond du secteur qui fait écho jusqu’à Strasbourg. Pascal Maire, le directeur général de la Foncière Alsace Vosges, une filiale à 100 % du Crédit Agricole Alsace Vosges, a été sollicité début 2022 pour se pencher sur un dossier, encore confidentiel à ce moment-là : la revitalisation de la ville thermale de Vittel pour en faire "une destination touristique et thermale unique au sein d'un écrin naturel d'exception". Un projet, nommé "Vittel Horizon 2030", bénéficiant d'une intervention forte des collectivités locales, dont la Région Grand Est, qui injecte 9,6 millions d’euros aux côtés d’acteurs privés.
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Développement du territoire
Avec son comité d’investissement, le directeur général de la Foncière Alsace Vosges aura mis seulement "quelques semaines" avant de se décider à investir dans le projet Vittel Horizon 2030. "Le contexte de crise fait que les rentabilités se sont dégradées et les prix ont été revus à la hausse mais nous avons décidé de maintenir notre soutien", raconte Pascal Maire. Concrètement, la Foncière Alsace Vosges, alliée à la Banque des Territoires (majoritaire sur ce projet), a signé pour acquérir trois des six bâtiments de Vittel : l’hôtel Ermitage, le Grand Hôtel et le Palmarium, un espace de soin à l’eau thermale. Réunis au sein de la société "Vittel Invest", les deux associés vont débourser un total de 55 millions d’euros, somme comprenant le rachat des murs et leur rénovation complète pour plus de 40 millions d’euros.
Le directeur général de la Foncière Alsace Vosges reconnaît que, sur ce projet, la rentabilité n’est "pas à la hauteur de ce que l’on pourrait attendre", soit environ "deux fois et demie moindre" par rapport à ce qui peut être dégagé sur des projets comparables. "Mais le projet Vittel Horizon 2030 va permettre de pérenniser 400 emplois directs et plus de 1 000 emplois indirects, pour 1 à 1,5 million d’euros de retombées", insiste le directeur général de la Foncière Alsace Vosges.
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Effacer l’effet Covid
Affichant la même confiance dans le potentiel du thermalisme, le PDG du groupe parisien France Thermes, Sylvain Sérafini, qui va exploiter les installations de Vittel à partir du 1er janvier 2023, veut oublier l’impact du Covid sur son groupe, qui pèse 70 millions d’euros de chiffre d’affaires et emploie 1 100 personnes, pour retenir "la mise en lumière de la nécessité de prendre en charge sa santé".
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À horizon 2030, Sylvain Sérafini veut convaincre 7 600 curistes conventionnés de fréquenter la station de Vittel, contre un peu moins de 5 000 en 2019. Et pour le "spa nature" qui doit s’installer dans le Palmarium autour d’un concept mêlant bien-être et prévention, le patron de France Thermes veut arriver à 70 000 entrées, contre 20 000 pour l’infrastructure telle qu’elle existe aujourd’hui. Repreneur des 72 salariés actuellement occupés dans la partie thermale de la station, Sylvain Sérafini prévoit de créer "plus d’une centaine d’emplois" pour couvrir les nouvelles activités. L’ouverture de l’ensemble du projet est programmée pour la "saison 2025". Au risque de créer une concurrence impitoyable avec les autres stations du Grand Est ?
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Source : Journal des entreprises - 01 12 2022







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